Roméo et Juliette

Roméo et Juliette Thèmes

L'amour

Bien que Roméo et Juliette soit considéré comme un archétype de la relation amoureuse, la pièce ne dépeint qu'un type d'amour très spécifique : un amour jeune, irrationnel, passionné et violent. Shakespeare suggère que le type d'amour que ressentent Roméo et Juliette conduit les amants à s'isoler du monde qui les entoure. Ils renoncent à leurs autres engagements familiaux et amicaux. Si la sexualité est omniprésente dans la pièce, par le biais de blagues paillardes et dans le récit de la nuit partagée par les deux époux, elle n’est pas au centre de leur relation. Dans la plupart de ses œuvres, Shakespeare s'intéresse davantage aux étincelles de l'engouement qu'à l'engagement amoureux lui-même. Shakespeare respecte le pouvoir d'un amour aussi jeune et passionné, mais en déplore le caractère éphémère.

La mort

La mort est omniprésente dans la pièce. Avant que Mercutio ne soit tué – ce qui marque le tournant tragique de l’œuvre – , Shakespeare se réfère plusieurs fois à la mort comme étant l'épouse de Juliette. Les personnages de Roméo et de Juliette envisagent la mort à plusieurs reprises : Roméo tente de se suicider à l'Acte III, puis achète du poison à l’Acte V. Le chœur annonce la fin tragique de l'histoire dès le début de la pièce, ce qui influence l'expérience du public dès le départ : cet amour ne peut être que tragique.

L'âge

Shakespeare dévoile tout au long de la pièce le fossé idéologique qui sépare souvent les adolescents des adultes. Les personnages jeunes sont tous présentés comme passionnés ou violents, les personnages plus âgés sont dépeints comme rationnels et pragmatiques. Ces traits de caractère que Shakespeare associe à l’âge définissent entièrement les personnages. Lord Capulet et Lord Montague sont des ennemis qui ignorent les conséquences émotionnelles de leur querelle. Frère Laurence envisage l’union de Roméo et Juliette uniquement en termes de bénéfices politiques. Bien que Shakespeare ne propose pas de morale à la division entre jeunes et vieux, il suggère que le cynisme qui vient avec l'âge est l'une des nombreuses raisons de la discorde humaine, plus que la violence et les effets meurtriers de la “ passion ” des adolescents.

L’identité

Shakespeare présente des personnages dont l’identité familiale les emprisonne dans des rôles qu’ils n’ont pas choisis. Ce thème se manifeste notamment dans le monologue de Juliette au balcon, dans lequel elle demande : “ Ô Roméo ! Roméo ! pourquoi es-tu Roméo ? ”. Pourtant, l’amour entre Roméo et Juliette n’a rien d’une provocation qui vise à défier leurs familles respectives : ils ne savent initialement pas le nom de famille de l’autre. Ils doivent toutefois choisir entre leur famille et leur amour. Leur choix signifie l’abandon du cocon familial et l’exposition à la violence.

Le genre

La pièce de Shakespeare reprend les codes genrés et patriarcaux de l’amour considéré comme “ romantique ” : la dévotion totale entre les amants, la jeunesse exacerbée de la femme, l’honneur de la famille, la violence masculine. Certains critiques considèrent toutefois que Shakespeare bouleverse certaines attentes en matière de genre au travers du personnage de Roméo, qui présenterait des caractéristiques traditionnellement considérées comme féminines : il ne fait pas preuve de la même agressivité que ses pairs, il est rêveur et moins enclin à l’action directe. De même, certains ont noté que Juliette présente elle des traits de caractère traditionnellement considérés comme masculins : elle prend des décisions rapides et tient tête à sa propre famille. Cependant, l'indépendance de Juliette est rapidement étouffée par l'insistance de son père à vouloir la marier à Pâris. Ce bouleversement limité des codes de genre patriarcaux n’a finalement que peu d’importance dans le dénouement de l’intrigue.

La vengeance

La pièce présente le désir de vengeance comme un trait de caractère humain à la fois inné et dévastateur. La plupart des actions de la seconde partie de la pièce sont initiées ou motivées par la vengeance : Tybalt tue Mercutio car il souhaite se venger de la provocation de Roméo, venu au bal masqué des Capulet ; Roméo tue Tybalt pour venger Mercutio. Le désir de vengeance de Roméo est si puissant qu'il ne réfléchit pas aux implications de son acte sur son mariage. Le point de départ de l’intrigue repose par ailleurs sur une querelle entre les Montague et les Capulet, dont la cause n'est pas explicitée et n’a pas d'importance.

Le mariage

Dans Roméo et Juliette, Shakespeare propose une vision critique de l’institution du mariage. Le seul mariage consensuel ne peut se faire qu'en secret, et Frère Laurence semble désapprouver l’union si rapide des personnages. La manière dont Lord Capulet insiste pour que sa fille se marie à Pâris montre que le mariage est une arme politique et patriarcale utilisée pour contrôler la volonté de Juliette. Même Frère Laurence, personnage religieux de la pièce, considère le mariage comme politique : il marie Roméo et Juliette car il espère que cette union mettra fin à la querelle entre leurs familles, et non pas parce qu'il approuve nécessairement leur amour. Shakespeare semble suggérer qu’un mariage fondé sur l'amour pur n'a pas sa place dans un monde qui abuse de l'union sacrée. Le mariage de Roméo et de Juliette se termine par la mort des deux amants, montrant que ce type d'union passionnée ne peut exister dans un monde alimenté par la haine et la vengeance.