Thérèse Raquin

Thérèse Raquin Résumé et Analyse

Au lieu de combattre la présence fantomatique de Camille, Thérèse et Laurent s’enfoncent de plus en plus dans un état de désespoir fou. Ainsi, tous deux succombent aux pires aspects du tempérament de Thérèse : son hypersensibilité, son irritabilité, ses névroses. Aucune morale n’agit au cours de ces perturbations ; au contraire, une peur animale pousse ces deux personnalités opposées vers un point de non-retour.

Pendant une semaine, Laurent et Thérèse souffrent d’insomnie. Même si toute leur affection l’un pour l’autre a disparu, la lassitude les pousse finalement à tenter de dormir dans le même lit. Ils portent leurs vêtements sous les draps, et chaque fois qu’ils essaient d’alléger en échangeant une caresse ou un baiser, ils se retrouvent dégoûtés puis se dégagent l’un de l’autre. Malgré son état affaibli et pitoyable, Laurent exhorte Thérèse d’être forte et courageuse. Il se demande comment il pourrait enfin chasser l’influence de Camille.

Éperdus et désemparés, Laurent et Thérèse tentent une nouvelle tactique désespérée pour chasser le cadavre de Camille. Laurent saisit Thérèse pendant qu’ils dorment, et les deux s’échangent des baisers féroces et s’engagent dans des rapports vicieux et épuisants. Mais une fois terminé, mari et femme éclatent en sanglots. Ils savent que le cadavre horrible et vengeur de Camille occupera toujours leur lit, et ils se demandent tristement ce qu’ils deviendront.

Entre-temps, Grivet et le vieux Michaud se réjouissent du mariage de Thérèse et de Laurent. Les deux hommes avaient été déprimés par l’humeur sombre des réunions du jeudi après la mort de Camille, et craignaient que les Raquin quitte complètement Paris. Étonnamment, Thérèse est contente de voir les jeudis soirs continuer. Ses vrais moments de torture sont ceux où elle est avec Laurent, et tout ce qui lui permet d’être soulagée de sa présence est bien accueilli. Les sentiments de Laurent envers Thérèse sont à peu près les mêmes.

Comme Thérèse et Laurent ont peur de leur chambre matrimoniale et de la compagnie de l’autre, ils commencent à s’occuper de Mme Raquin et trouvent un apaisement dans son flot constant de bavardages. Mais cette forme de soulagement ne durera probablement pas longtemps, puisque Mme Raquin est progressivement gagnée par la paralysie. Thérèse et Laurent craignent le jour où son discours ne sera plus là pour les distraire. Malgré ces angoisses constantes, le couple parvient à tromper les convives du jeudi soir, parfois sans effort ; Grivet, par exemple, plaisante au sujet des poches sous les yeux de Thérèse, qui seraient dus à des ébats nocturnes, ne soupçonnant jamais l’horrible vérité.

Il faut quatre mois d’inertie, marqués par la torture psychologique, avant que Laurent ne décide de réaliser son mariage et d’obtenir quelques bénéfices durables. Sa décision de quitter son emploi au chemin de fer choque le vieil employé de bureau Grivet. Puis Laurent loue un studio, et décide de poursuivre une vie d’artiste tranquille. Mme Raquin accepte le nouveau projet de Laurent et Thérèse s’en réjouit comme un moyen d’échapper à la présence détestée de son mari, au moins de façon intermittente.

Laurent ne peint pas pour en faire une carrière, mais pour oublier. Un jour au détour d’une de ses errances, il croise un vieil ami qui a rencontré un véritable succès critique dans le monde de l’art. Il invite cet l’ami à son atelier, et cette connaissance - se rappelant le manque de talent de Laurent mais cependant curieux – décide de le suivre. Dès que Laurent montre ses travaux récentes, l’ami reste incrédule d’étonnement. A présent, miraculeusement, Laurent a de superbes techniques de peinture et manifeste une véritable inspiration.

L’ami exprime son admiration, mais fait aussi une critique constructive : tous les visages que Laurent a peints sont semblables. Après son départ, Laurent réexamine ses toiles. En effet, toutes tous ces portraits ressemblent à Camille. Dans une frénésie, Laurent tente de peindre une nouvelle figure distincte de celle de à l’homme noyé - en essayant des filles, des caricatures, même des chats et des chiens. Cela ne sert à rien. Il arrête ces dessins fiévreux et, désespéré, il se rend compte qu’il n’échappera jamais aux réminiscences de Camille.

Analyse

Durant la majeure partie du livre, Laurent semble être le meneur de sa relation avec Thérèse - d’abord en initiant leur liaison, puis en tuant Camille. Mais, Thérèse exerce maintenant l’influence la plus grande. Sous l’emprise de la « nature fervente » de Thérèse, Laurent constate que « son (propre) tempérament [est] devenu peu à peu celui d’une fille secouée par une névrose aiguë ». Mais ce n’est pas forcément synonyme d’état de faiblesse. Et, (bien qu’il n’en soit pas conscient) la sensibilité aigue de Laurent finira par se manifester de manière spectaculaire et artistique.

Pour le moment, le couple malheureux fait une dernière tentative pour soulager sa leur souffrance en faisant l’amour, mais ils obtiennent l’effet inverse. Zola utilise à plusieurs reprises des images qui indiquent la torture extrême qui résulte de cet effort, où les meurtriers semblent être « irrités par les charbons ardents »; ils ont l’impression que « des pointes rougies étaient entrées dans leurs membres» et ils finissent par pleurer « des larmes de sang ». Au lieu de servir de métaphore de passion ou d’inspiration, les images de chaleur et de feu de Zola servent simplement à traduire l’agonie.

En effet, la seule façon pour Thérèse et Laurent d’éviter d’échapper au fantôme de Camille, c’est de vivre moins passionnément, en s’adonnant aux futilités et aux choses ordinaires qui ont jadis tant exaspéré Thérèse. Maintenant, celle-ci accueille les invités du jeudi, écoute avec gratitude les bavardages de Mme Raquin, et s’intéresse même à l’état de l’appartement, prise par une constante « envie de ranger ». Vu de l’extérieur, elle vit exactement le genre de vie qu’elle a connu vécu à l’époque de Camille ; maintenant, elle affiche un certain enthousiasme pour l’accomplissement des tâches du foyer en bonne bourgeoise les devoirs d’une bonne au foyer.

Laurent, dont les activités de peinture ont été négligées pendant un certain temps, semble également revenir à sa personnalité précédente. Il quitte son emploi et loue un atelier d’artiste, retrouvant en une partie la nonchalance et l’irresponsabilité de sa vie avant le meurtre - ou du moins semble-t-il. En réalité, il utilise la peinture pour fuir Thérèse et Camille, pas (comme pour le portrait de Camille) pour se rapprocher des Raquin ? . Et même la nature de sa peinture a changé de façon significative ; là où autrefois il travaillait à partir de modèles vivants, maintenant il se sent obligé de peindre « ce que son imagination suggère ».

Le destin de Laurent est tristement ironique : les différents aspects de sa personnalité ne feront jamais de lui un grand peintre, ni même un peintre décent/notable. Au départ, il manquait de technique et d’inspiration réelles, mais au moins il était calme et assez équilibré pour finir une toile jusqu’au bout. Maintenant, il a acquis à la fois technique et inspiration, mais chaque portrait qu’il dessine est viciée par la « ressemblance familiale » avec Camille. Il représente un pouvoir futile, dont la force, la jeunesse, et maintenant le talent artistique ne trouveront jamais un exutoire intéressant/avec du sens/significatif. Tout comme Thérèse, Laurent est paralysé par son tempérament et la vie dans laquelle il est enfermé.