Une Vie

Une Vie Résumé et Analyse

Le roman s’ouvre sur le départ de Jeanne qui quitte avec joie le couvent du Sacré Cœur à Rouen sous une pluie battante. Elle rentre chez elle avec son père, sa mère et Rosalie sa sœur de lait. Ce début de roman nous présente la personnalité du père de Jeanne, ainsi que celle de Jeanne. On comprend rapidement que la famille de Jeanne est aristocrate, ils sont riches et possèdent de nombreuses fermes. On nous décrit dans ce premier chapitre leur périple jusqu’à leur maison. À leur arrivée, l’auteur décrit de manière précise leur manoir, la chambre de Jeanne ainsi que ses tapisseries, ses meubles et la vue de sa chambre donnant un aperçu du jardin de la bâtisse. Face à cette vue, Jeanne se met à rêver de l’amour futur toute la nuit avant de partir découvrir les rénovations de leur demeure ainsi que la ville avec son père le lendemain.

L’auteur décrit dans le second chapitre la nouvelle vie de Jeanne. Il explique ses différentes activités et le lien qu’elle entretient avec l’environnement et le paysage. De la même manière, l’auteur nous fait en apprendre davantage sur le quotidien du père de famille, chargé d’investir dans le monde agricole et sur la mère de famille qui souffre d’une maladie, « l’hypertrophie du cœur » qui semble la condamner à mener des journées lentes et laborieuses. Cependant, la mère de Jeanne semble aussi souffrir d’une nostalgie qui la pousse à replonger dans ses rêveries et ses souvenirs d’enfance à travers lesquels elle emporte Jeanne. C’est d’ailleurs lors d’une des balades entre les deux femmes que le prêtre apparu. Nous suivons alors la rencontre entre les personnages, peu enclin à suivre le dogme catholique, bientôt rejoints par le père de famille. C’est à travers cette rencontre que le personnage de Monsieur le vicomte de Lamare, jeune rentier cherchant à se marier, entre dans la vie de la famille de Jeanne.

Le troisième chapitre est marqué par la rencontre entre les famille de Jeanne, Jeanne et le Vicomte de Lamare décrit comme un homme charmant qui plaît aux femmes. Adélaïde se rendant compte de l’amitié de son père et de celui du vicomte de Lamare lance une discussion autour de la parenté et de sa généalogie. Les relations entre le vicomte et la famille de Jeanne se développent alors que le jeune homme semble développer un intérêt pour Jeanne. Les deux jeunes gens se retrouvent régulièrement pour sortir notamment lors d’une sortie en mer avec le baron jusqu’à Étretat où ils prirent le déjeuner. Les deux jeunes amoureux se retrouvent alors seuls lors d’une balade. Ils échangent des confidences et se rapprochent jusqu’au retour du soir où ils se partagent leurs envies de voyage. Le lendemain matin elle est apprêtée et accompagnée par sa famille et le vicomte vers la plage ; en surprise, Jeanne et Julien devinrent parrain et marraine d’un nouveau bateau. Au retour, après le déjeuner, le vicomte demanda à Jeanne de l’épouser.

Analyse

Dans ce début de roman, incipit in medias res, Maupassant met en place un contexte spatio-temporel ; l'histoire se déroule en Normandie autour d'une Jeune femme, Jeanne, entrant dans l'âge adulte. Le chapitre se concentre sur des descriptions ; la première est celle de Jeanne et de son père que l'auteur oppose à travers deux points de vue distincts. En effet, le baron est présenté comme strict et cherche à protéger sa fille alors que Jeanne est décrite comme une jeune fille pleine de vie cherchant à découvrir le monde, elle est d'ailleurs comparée avec un arbre grandissant. On comprend très vite que Jeanne est très curieuse et rêveuse, elle nous partage son rêve de grand amour qui dans une accumulation de détails imaginaires accélère le rythme du récit comme pour correspondre au rythme libre de ses pensées face à sa nouvelle liberté. Cependant, ces grandes attentes semblent présager son avenir funeste, tout comme la présence de la tenture de Pyrame et Thisbé dans sa chambre qui annonce presque sa désillusion amoureuse. Cependant, la description ne s'arrête pas aux personnages, elle décrit également le mode de vie aristocratique qui est de manière discrète opposée au mode de vie populaire qu'il décrit lors d'une balade en ville de Jeanne avec son père en insistant sur les mauvaises odeurs avec les " débris ", " l'odeur forte de saumure ", " les senteurs des familles " qui suppose au luxe de la demeure de Jeanne. Toutes ces descriptions sont ponctuées de différents modes d'écriture oscillant entre narration, description, dialogue comme par touches qui rappellent la peinture impressionniste.

Le second chapitre, plus court, ne semble exister que pour décrire les antériorités des personnages déjà présentés et pour introduire celui de Julien. L'intériorité de Jeanne par exemple est décrite à travers la personnification du paysage. En effet, le lien marqué entre Jeanne et le ciel ou bien la mer faire référence à ses grandes aspirations, à la grandeur de ce paysage comme pour rappeler son inconscience de la réalité. Dans un autre registre, la mère de famille est décrite à travers sa condition physique malade mais aussi à travers sa nostalgie laissant présager l'idée que sa maladie physique (hypertrophie du cœur) qui signifie avoir un cœur trop gros, serait aussi une maladie mentale. Cette mélancolie profonde qui caractérise le personnage n'est pas sans rappeler celui de Flaubert dans Madame Bovary mais semble également déteindre sur Jeanne qui s'identifie à cette désillusion comme en présage de sa propre déchéance au cours du roman. Ces descriptions sont marquées par des phrases très longues créant une atmosphère lente, profonde et qui s'oppose aux phrases du récits très courtes décrivant l'avancée de l'intrigue, comme si la description importait plus que le récit. De la même façon, l'introduction de Julien dans la famille de Jeanne, pourtant un évènement important pour la vie des personnages, est marqué par une accélération du rythme narratif.

Le début du troisième chapitre montre la relation naissante entre Julien et la famille de Jeanne. Le jeune est décrit comme un homme plaisant mais l'utilisation des verbes d'opinion exprimant l'incertitude laisse présager la vacuité de son esprit. L'utilisation du discours direct pour retranscrire la conversation de Julien et la baronne à propos de la généalogie montre ironiquement leur goût futile pour la question de leur lignée aristocratique. Le tout associé à un vocabulaire condescendant pour retranscrire au discours direct les propos de Julien, avec " un certain Bassolle " ou " riche dit-on ", laisse présager l'idée que ce personnage serait un cliché de l'aristocrate, un archétype représenté ici dans un objectif naturaliste de dépeindre la société. À l'inverse le père Lastique est présenté comme un homme du peuple avec la retranscription de son patois local au discours direct. Du côté de Jeanne, son amour naissant avec Julien est illustré par la balade en bateau et la métaphore filée de la mer qui décrit leur relation naissante. L'auteur n'hésite pas à utiliser un vocabulaire sexuel pour décrire le paysage comme reflet des sentiments des personnages, " Soleil dévorant ", " alanguis ", " affamés ", " ciel torride ". À travers l'incarnation de l'intériorité des personnages dans le paysage, l'auteur peut choisir de ne pas décrire de manière directe leurs pensées. De cette manière, le lecteur peut se faire sa propre idée de l’intériorité de Jeanne et Julien et peut s’imaginer quelque chose qu’il n’est pas possible d’écrire sous peine de censure à cette époque. Enfin, la scène du baptême de bateau est racontée avec un rythme soutenu comme pour témoigner de la surprise de Jeanne mais aussi de la rapidité des évènements tout en faisant référence à leurs fiançailles prochaines, évènement paradoxal, car c'est seulement à ce moment que Jeanne apprend quel est le prénom de Julien.