Rhinocéros

Rhinocéros Le théâtre de l'absurde

Le Théâtre de l'Absurde est un style de théâtre apparu en Europe dans les années 1940-1960, caractérisé par son rejet des normes traditionnelles de la dramaturgie classique. Il privilégie des situations confuses, des personnages étonnants et des arcs narratifs improbables. Ce mouvement a révolutionné la façon dont le théâtre s’empare de la comédie, notamment en privilégiant la tragicomédie grâce à l’apport d’éléments dramatiques ou horrifiques. En cela, le Théâtre de l’Absurde s’inscrit dans la lignée de Shakespeare, des Marx Brothers et de Charlie Chaplin. On peut penser que le Théâtre de l'Absurde a trouvé un moyen de toucher profondément le public, à la fois en le mettant mal à l’aise et en retenant la catharsis.

Le critique anglais Martin Esslin a inventé ce terme dans son livre de 1961 intitulé " Théâtre de l'Absurde ". Ce style a été associé à des dramaturges tels qu'Eugène Ionesco, Arthur Adamov, Jean Genet et Samuel Beckett. D'autres dramaturges ont aussi été qualifiés d’absurdes, notamment Edward Albee, Jean Tardieu et Tom Stoppard. Bien que chacun d'entre eux conserve indéniablement une voix et un style distincts, leur travail collectif partage des préoccupations communes.

Bien que les critiques distinguent généralement le Théâtre de l'Absurde de l'existentialisme, ces deux mouvements, si l'on peut les qualifier ainsi, partagent un intérêt commun pour l’exploration philosophique de la finalité de la vie et de la signification, le cas échéant, qu'elle pourrait revêtir.

Ces œuvres utilisent délibérément l’absurdité pour aborder de manière surprenante et inhabituelle ces questions fondamentales. La plupart du temps, les individus vivent leur vie quotidienne sans être confrontés aux horreurs des guerres mondiales. Les œuvres absurdes ont pour effet de secouer le public, le rappelant à leur étrange isolement.

Dans Rhinocéros, par exemple, ce qui commence comme une situation humoristique où les hommes se transforment en rhinocéros devient progressivement inquiétant, voire horrifiant, lorsque chaque être humain, sauf un, se métamorphose. Contrairement aux pièces traditionnelles, où le public a l’habitude soit de rire, soit de pleurer, Rhinocéros et d'autres œuvres absurdes laissent les spectateurs en suspens, les incitant à réfléchir davantage au sens de la vie.

Le Théâtre de l'Absurde rejette également les structures narratives conventionnelles, s'inscrivant ainsi dans une tendance artistique initiée au début du XXe siècle. Le Théâtre de l'Absurde pousse encore plus loin en embrassant délibérément l'idée du non-sens. Ce mouvement est souvent associé au dadaïsme, un courant culturel qui a émergé en Europe après la Première Guerre mondiale, et qui célèbre le chaos et l'irrationalité. Les dramaturges absurdes explorent des préoccupations similaires en créant des personnages souvent perdus dans des mondes incompréhensibles. Les scènes sont souvent répétitives, comme dans La Cantatrice chauve d'Ionesco, tout comme les dialogues, par exemple dans Rhinocéros.

De nombreuses œuvres absurdes tournent également autour de mystères non résolus, ou de l’idée même du néant. Dans Les Chaises d'Ionesco, par exemple, un couple âgé organise une fête dans sa maison pour des invités, que le public ne peut pas voir. Dans En attendant Godot de Beckett, deux personnages passent toute la pièce à attendre quelqu'un qui ne vient jamais. Ces pièces se démarquent nettement des techniques narratives traditionnelles, rendant l’expérience théâtrale déroutante pour le public.

Les critiques ont tendance à considérer qu’il existe une " première génération ” de pièces du Théâtre de l’Absurde, mises en scène à Paris jusqu’aux années 70. Les dramaturges ont délibérément perturbé leur public, démantelé les conventions traditionnelles et déconstruit leur propre forme d'art. Même si les horreurs des guerres mondiales et les tensions de la Guerre froide s'estompent dans la mémoire collective occidentale, il demeure crucial de ne pas les oublier.